R96-3) Les dos se sont tournés
             (D’après : « Les espaces verts ». 
Algues)

ALGUES

Les dos se sont tournés, les proches s’en sont allés, laissant dans l’espace autant de traînées algales ondoyantes et vivaces. D’abord précises et d’un vert toujours pur (bien que jamais semblable), ces poussées végétales doucement emmêlées peu à peu se relâchent, s’embrument, jusqu’à se fondre entièrement pour occuper, sans plus de distinction, tout mon ciel. 

C’est dans cette filasse vaguement jade et m’enveloppant tout entier que mes pensées parfois (quand le présent me pèse, quand mon sang se fait lourd) s’élancent ; là que je bêche mes heures, que j’élague mon ennui ; et c’est par les hublots percés dans cette forêt paresseuse et diluée que je regarde le monde, à l’abri des autres autant que de moi-même.